La traduction en italien sera l'objet d'un nouveau post.
Depuis les premiers jours que l'homme a fait son
apparition sur terre, après un premier moment d’étonnamment face
au réel, il s'est littéralement construit en tant qu'homme,
toujours en faisant quelques choses.
Affiche/flyer d'invitation |
D'abord, c'était question de survie et, comme les
animaux, il a construit ses abris et il a perfectionné ses tactiques
des chasse, après il a appris à se faire des outils et, ensuite, il
a pris le goût de créer des choses qui ne sont pas en rapport
direct avec son survie, c'est-à-dire des choses "inutiles"
qui lui rappellent sans arrêt la tension qui le pousse à se
reconnaître en tant que appartenant au domaine des animaux
esthétiques, c'est-à-dire à ceux qui font quelque chose pour le
plaisir des sens et de l'esprit.
Dès que cela se produit, dès que l'homme fait quelque
chose sans en savoir clairement le pourquoi, mais pourtant il averti
presque une obligation à la faire, l'homme devient un créateur et
non plus un simple faiseur.
Est-ce que les animaux sont des faiseurs ou bien des
artistes?
Eux aussi ils se font des outils élémentaires et, avec
leurs corps et leurs œuvres, ils semblent rivaliser en beauté avec
la main de l'homme!
Mais est-ce que les animaux ont le sentiment de
création?
Mettez un chien devant un tableau, on aura tout de suite
la réponse.
Le chien regardera l'image, il la humera et il la
marquera en tant que sienne. Après il l’abandonnera à cause de
son inutilité pour lui.
Par contre, l'homme y reste, il la regard, il la touche,
il y voit quelque chose, cela lui parle, il se voit en elle, l'idée
cachée derrière la ligne et la couleur c'est un miroir pour lui, il
entend sa voix comme humaine, c'est le chant des sirènes à lui.
Mais pourquoi l'artiste a crée ce tableau? Pourquoi
a-t-il donné sa trace d'existence conduite par le moyen de l'art?
Pourquoi a-t-il chargé cet objet en tant que son porte-parole?
On essayera de donner des pistes d'interprétation sur
le pourquoi l'homme est hanté par cette volonté de faire et de
création qui, dans un premier regard, ne lui sont pas nécessaires:
il pourrait de même mener sa vie tout en ne créent pas des choses
"inutiles", il pourrait bien s’arrêter à faire pour
survivre, il pourrait bien laisser couler le temps qui lui est donné,
en profitant au mieux.
Que
ce soit un simple acte du quotidien, comme valider son billet du
métro, ou bien une création plus intime, comme remplir d'écriture
une feuille blanche, l'homme est condamné à faire pour être
quelque chose.
Au-delà
du simple acte qui nous garantie la survie, l'homme a toujours averti
le besoin de faire, en modifiant, ainsi, le monde qu'il habite et en
modifiant soi-même, avec les outils dont il dispose, c'est-à-dire
la raison et le corps.
Faire
est le moyen le plus matériel dont on dispose pour se sentir vivant,
faire est modifier le monde en lui donnant ainsi notre propre sens.
Mais
d'où vient ce besoin de faire pour se sentir vivant? On l'a dit,
nous pourrions bien nous contenter de remplir notre vie, en
utilisant, et pas en modifiant, le réel, cependant on trouvera
nulle-part quelqu'un qui mène sa vie sans modifier quelque chose,
sans faire quelque chose.
Même
ceux qui nous semblent se laisser vivre sans la moindre action de
leur part, font le monde, il se font un leur propre monde à eux, où
la paresse est loi, leur loi et leur sens.
On
essayera de suivre l’évolution de l'enfant faiseur jusqu'à le
voir homme qui fait, pour, ensuite, découvrir comme, de cet homme
faiseur, naît l'artiste-créateur.
On
est obligé à faire pour être, on l'a dit, mais depuis quand
avons-nous cet obligation?
Cela
se produit depuis la plus grande rupture qui jamais nous sois
arrivée, c'est-à-dire celle qui représente notre naissance.
On
pourra entendre notre naissance comme "un choc" du à notre
ouverture au monde. Après avoir vécu des mois dans le ventre de
notre mère, lieu étranger à nos catégories rationnelles, d'espace
et de temps, dont on n'a pas ni souvenir, ni les moyens pour en
avoir, nous voici dans le monde du temps qui coule et dans le monde
de l'espace à habiter. Mais, peut-on retenir l'expression de "choc"
pour un événement si beau que la naissance? Si on songe à cela, en
partageant un hypothétique avis d'un enfant, on pourra s'appuyer sur
les célèbres vers de Giacomo Leopardi, poète italien du romantisme
qui, dans son pessimisme existentiel, remarquait comme l'enfant qui
naît
"prova
pena e tormento, per prima cosa1",
c'est-à-dire
que, au début de son existence, l'enfant preuve de la peine et du
tourment.
Comment
peut-on le nier, vu que c'est notre pleur de peur qui marque le début
de notre existence sensible.
Et,
de plus, comment peut-on être à l'aise depuis la sortie du ventre
de notre mère.
On
a quitté le monde du rêve, on a laissé à jamais le chaud
primordial. Depuis notre apparition sur terre, on a froid, on est
obligé à respirer tous seuls pour survivre,
nous
découvrons notre corps nu, tandis que les autres sont tous habillés
ou bien, ils sont tous revêtus d'une blouse médicale.
La
naissance peut bien, alors, représenter une sorte d'apocalypse de
l'inactivité du fœtus et, par cela, une renaissance a une nouvelle
vie, celle active.
L'embryon
du vivant a pris, finalement, possession de son corps, cet être a
été soustrait au monde sans lumière, il a été réveillé du
sommeil de l'inactivité, il a été soustrait à la placenta qui l'a
nourrit pendant un doux naufrage qui a pris le temps de neuf mois.
Quand
on vient de naître, on pleure parce que, dès lors, on est seuls
face au monde. On doit faire sans arrêt, on doit être sans arrêt:
notre singulier voyage commence.
Depuis
les premiers mois de notre vie, notre place est, d'abord, celle
d'être encore une fois passifs, nous rassemblons à des boites à
remplir sans jamais en être plains.
Songeons
aux yeux des enfants, ils sont d'une couleur changeante, ils sont
grands et ils rassemblent à des éponges prêts à se tremper de
tout ce que leur arrive.
Petit
à petit, on s’aperçoit des limites de ce rôle passif face à
l’extérieur, la conscience d'être réclame son propre poste dans
le flux du vivant, on veut posséder le vivant pour nous sentir
vivants.
Petit
à petit, la conscience s'enrichie de la volonté de prendre place
dans le flux et,
de
la volonté de laisser une petite trace de notre être,
naît
la volonté de faire,
c'est-à-dire
de participer au réel à travers sa modification.
On
peut penser à la volonté de faire, naissante de la volonté de
s'approprier de ce que nous passe à travers, naissante de la volonté
de participer à ce flux vital des choses qui changent sans cesse,
pour ainsi en retenir une partie à marquer avec le souvenir de notre
passage sur terre.
De
la phase de l'observation passive de l’existant, on passe à celle
de la connaissance active de soi et du monde.
Dans
un premier temps, cela prend la forme d'une volonté de se nourrir du
monde, tout ce que on voit, tout ce que on touche et tout ce que on
entend,
on
veut le porter à la bouche, le mâcher, l'avale, le digérer.
On
veux connaître, prouver, expérimenté et on veut engloutir le
monde,
en
lui faisant passer un moment en nous, pour ensuite le voir transformé
en quelque chose qui contient notre trace.
On
pourrait entendre le geste de l'enfant qui mange, dans une volonté
de s'approprier du réel, il veut refaire le réel à son image et à
son gré.
Dès
lors, le geste faiseur s'impose en tant que réponse active au choc
de la naissance et on gardera cette volonté et cet obligation de
faire pour être, jusqu'à la fin de nos jours.
On pourra bien entendre la mort, alors, comme absence de
volonté, dans la mort, on n'est plus rien, la conscience est muette,
on s'est finalement approprié du monde, nous sommes monde, en
retournant à faire partie de ce dernier.
Mais, comment passe-t-on de l’expérience de quelque
chose à la création de quelque chose de nouveau et de jamais vue?
Comment arrive-t-on à la création et, notamment, à
celle artistique?
Or,
on pourra décliner de plusieurs façons l'acte de faire. La
respiration est un "faire", comme aussi l'est celui d'aller
acheter du pain.
Débarassons-nous
de la notion de faire pour survivre et allons vers la notion de
"faire quelque chose d'inutile à notre existence", un
objet, par exemple.
Même
dans ce dernier cas, il faudra poser une distinction entre les objets
qu'on crée, pour mieux viser notre but,
c'est-à-dire
celui de proposer de pistes d'interprétation, au sujet du pourquoi
on crée des objets inutiles qui, ensuite, on appelle de l'art.
Un
ouvrier crée ses objets avec ses propres mains.
D'après
cela, est-ce que il fait de l'art?
On
dirait oui,
il
est conscient de faire, il fait dans le monde, il fait à travers le
monde, il rend la matière vivante et, finalement, il crée.
Et
pourtant, il n'est pas tout seul dans ce processus de création: il
emploie une technique étrangère à lui-même, il s'aide de
machines, il n'a pas conçu le projet de l’œuvre, il fait sans
connaître la raison de ce qu'il fait,
il
ne travaille pour l'objet, il travaille pour la notion de travaille,
il
compte les minutes, les seconds qui les séparent de son retour à la
maison.
Il
ne se voit pas dans l'objet, ce qu'il fait ne lui appartient pas.
L’œuvre
pour être "la mienne" doit contenir en elle une empreinte
de moi, elle doit avoir reçu toutes mes soins, elle doit, au final,
m'appartenir,
je doit être mon œuvre!
L'objet industriel ne correspond du tout à ce que je
cherche, l'ouvrier le travaille en utilisant des gants, il ne le
signe pas, l'ouvrier produit des exemplaires qui se reproduisent tous
égaux, tous sans âme: il crée des avortements d'objet.
On cherche un objet qui puisse avoir en lui sa raison
d'être, qui puisse me faire sentir vivant en le regardant, qui
puisse me parler des étroits chemins de l'homme vers l'appropriation
de soi même. Je cherche un objet parlant.
Cela peut bien être le cas d'une forme supérieure du
faire, on parle de l'artisanat.
A bien voir le produit artisanal contient en soi la voix
de son auteur et, de plus, le mot artisanat contient, en lui, le mot
art.
Au Moyen Age, le mot artiste, du latin "ars",
c'est-à-dire technique, indiquait un bon artisan , un "artifex",
un "faire avec technique", quelqu'un qui fait, mieux d'un
autre, quelque chose qu'a une utilité pratique, quelque chose qui
nous rend plus à l'aise dans notre quotidien.
À ce moment, il n'y avait pas une grosse différence
entre le mot artiste et artisan, touts les deux exprimaient un
savoir-faire.
Pendant la Renaissance, les deux mots prendront des
chemins différents.
L'artisan, dorénavant, sera celui qui fait quelque
chose de beau et d'utile,
l'artiste sera celui qui fait le beau inutile.
C'est exactement la notion d'utilité de l'objet fait
par l'artisan qui compromet l'attribution du verbe créer à ce que
sort de mains de l'artisan.
Un objet d'art n'est jamais utile, il n'a pas de but
bien défini, il ne sert pas à quelque chose, l'art nous rend la vie
plus difficile, il nous oblige à réfléchir, à penser, il nous
rajoute des pensées, il nous fait passé du temps à chercher des
réponses.
L'objet artisanal est beau, c'est vrai, mais il a pour
but celui de nous rendre mois compliqué la vie matérielle, l'art,
au contraire, a pour but celui de nous donner des pistes, des
sensations, des impressions à travailler avec nous-même, l'art nous
fait perdre du temps, au lieu de nous le faire gagner.
Et puis, l'objet d'artisan est fait pour être vendu,
l'objet d'art non, il peut être acheté, c'est vrai, mais on sait
même pas pourquoi on l’achète, il nous plaît, ou plutôt, il
nous offre un appel d'humanité auquel on ne sait pas renoncer.
À bien voir, on cherche un type de faire plus intime,
un faire qui crée un objet qui nous rassemble, un objet avec qui
établir un rapport d'existence,
notre vie doit dépendre de lui et sa vie de la notre.
Cet objet qu'on cherche doit sortir d'un esprit
créateur, cet objet doit être la projection dans ce monde de sa
seconde sortie, depuis la première, c'est-à-dire, celle du ventre
de notre mère.
On cherche un objet qui nous attire par sa proximité à
notre âme, un produit inutile, mais que pourtant on veux avoir,
je peux vouloir des tasses à cafés artisanales plus ou
mois belles et utiles et, faute d'argent, je peux me contenter
d'avoir celle-ci ou celle-là.
Mais l'objet qu'on cherche est unique, je veux celui-là
et pas d'autre, il n'y a que lui qui parle ma langue, les autres
murmurent des idiomes que je ne comprends que peu et mal.
Toute à l'heure, on a utilisé cette expression:
"esprit créateur" au lieu de "faiseur", terme
qu'on a utilisé jusqu'à présent.
Il faut fournir une clarification à l'égard de ces
deux verbes, faire et créer.
Essayez de trouver des synonymes pour le verbe faire,
je peux employer les verbes utiliser, produire,
fabriquer, organiser, forger, etc.
Ceux-ci sont tous verbes qui renvoient à l'exploitation
de quelque chose qui existe déjà dans la nature, qui nous est déjà
donné, prête pour être modifiée.
Par contre, le verbe créer nous demande un effort
supplémentaire.
Ça veut dire quoi créer?
Ses synonymes peuvent bien être concevoir, imaginer,
tous des verbes qui nous renvoient à la dimension de
l'imaginaire, du rêve, d'une condition sans temps et sans matière,
dans la création c'est lui, désormais on peut l'appeler artiste,
qui crée le temps de son objet, pensez aux création éphémère,
celles qui n'existent qu'on moment comme la performance, ou à celles
qui sont destiné à perdurer dans les siècles, l'artiste peut
décider le temps de vie de l'objet et, de plus, il peut aussi
décider la matière à utiliser pour la création, je crée d'abord,
dans un premier temps, dans mon esprit et puis je décide de revenir
dans le monde matériel, de renaître en utilisant ses moyens.
On peut considérer l'artiste comme un Dieu créateur?
Effectivement, en essayent d'élucider le mot création,
c'est sa signification théologique qu'il faut mettre en avance.
En religion, on appelle créateur celui qui tire ex
nihilo, c'est-à-dire du néant, quelque chose de jamais vu
auparavant, quelque chose de différente de la nature qui l'entoure
et qui ne trouve sa raison d'apparition que dans le créateur même,
dans son vécu, dans sa pensée, dans son façon d'entendre le monde,
dans un mot, dans sa conscience d'être ici et
maintenant, c'est-à-dire influencée par le lieu et par le temps.
Voici le pourquoi ils n'existent pas des ouvres sans
temps, des "evergreen". Je sais que je vais toucher un
tabou, mais la Joconde, en tant que objet d'art, ne parle plus comme
elle parlait à un spectateur de son époque, elle nous parle
aujourd'hui, mais elle emploie un vocabulaire actuel, notre
vocabulaire.
Peut-être que le but de Dali, qui lui a rajouté des
moustaches, était celui de lui faire utiliser des nouveaux mots,
ceux du surréalisme.
Mais
pourquoi, pendant son passage dans ce monde, l'artiste a le besoin de
créer, en entendant la création comme une ré-naissance, une
seconde sortie, après le faire-sortie du ventre du notre mère?
D'où
vient-elle cette volonté de devenir géniteur/créateur d'un objet
auquel l'artiste confie son interprétation du réel?
Pourquoi
créer un objet-projection qui a sa propre place dans le monde et qui
l'artiste pourrait bien appeler "son enfant à lui", sorte
de foetus explosé que, dès lors, a une vie indépendante de lui,
mais qui pourtant il le tient attaché d'un attachement similaire à
celui d'une maman qui sait son enfant perdu quelque part dans le
monde.
Pour
arriver à ça, il faudra, d'abord, éclairer d'où vient cette
création.
Toute
création dérive de l’expérience de l'existence, soit-elle
exploitée par moyen du corps et soit-elle exploité par moyen de la
raison.
C'est
la philosophie qui nous apprend que c'est à travers le corps et la
raison qu'on fait l'expérience de ce monde.
On
a la perception de l’extérieur par notre corps et on cherche
d'organiser les sensations qui cela nous apport à travers notre
cerveau, en faisant de notre mieux, c'est-à-dire en poussant aux
extrêmes nos limites humains.
Une
fois sur terre, nous sommes littéralement bombardé de sensations
provenant de ce que on peut toucher, de ce que on peut voir, de ce
que on peut manger etc.
Vivre
est donc se sentir vivants par moyen de ce que nous entoure et qui
nous stimule sans arrêt.
En
tant que vivant, on est obligé tout le temps à sentir et penser à
quelque chose, même pendant nos moments de relax et nos exercices de
méditation, on ne perd jamais le rapport avec l'autre, nous-même
dans ces derniers cas avec nos pensées rythmés par le battement de
notre cœur.
Donc,
toute création est influencée par le vécu et la sensation, mais
pourquoi ne pas se limiter à accepter le flux des sensations?
Pourquoi cette volonté de réagir par moyen de la création?
Il
y a une chose que chaque homme, depuis quelques mois après sa
naissance jusqu'au derniers moments de sa vie, ne perd jamais.
C'est
la volonté qui naît de l'affirmation de soi dans le temps et dans
l'espace.
Et
l'artiste, créateur des objets inutiles, n'échappe pas à cela,
de
plus, il charge l'affirmation de soi avec une empreinte plus profonde
du faire pour l'argent ou du faire pour survivre.
Il
affirme soi-même en créant quelque chose qui a sa place dans le
monde et qui puisse parler de lui pour l'éternité ou pour un
moment.
L'artiste s’aperçoit d'avoir quelque chose à dire à
ce monde, il considère son expérience du monde digne d'être
communiqué aux autres. Pour ce faire, il crée son enfant, il crée
son porte-parole auquel il confie son message existentiel.
La
création est, beaucoup plus du faire, une affirmation de soi. D'un
soi qui n'est rien, et que pour se faire quelque choses, doit créer
en se créant, en cherchant d'être quelque chose en rassemblant à
ce qu'il fait.
L'artiste
a besoin de voir ce qu'il crée, de lire sur papier ses poème, de
toucher ses sculptures, il ne se contente pas de vivre dans la
rêverie de l'imagination, il doit projeter soi-même dans le monde
du réel.
Et
cette projection de lui prend la forme d'un objet extérieure qui a
sa propre place dans le monde, en raison du fait qu'il est donné à
l'autre.
L'artiste
crée et offre sa création sans rien demander en échange, ceux qui
reçoivent un objet d'art, ou l’achètent, ne seront jamais les
propriétaires de l'objet, mais des locataires de la vie de
l'artiste.
L'artiste
crée et offre sa création naissante de son intérieur, le plus
intime, au fin de l’insérer dans le grand flux de la vie de
l'homme.
Tout
à l'heure, on a évoqué la création d'un enfant, en la entendant
comme volonté de s'emparer du monde extérieur.
Voici
une différence essentielle entre le faire de l'enfant-homme et la
création de l'artiste, l'enfant-homme fait pour plaire ou déplaire
à ses parents,
l'artiste
crée pour partager soi-même, il se décompose en atomes et il se
donne au monde.
L'artiste
sent sans arrêt le poids du monde sur ses épaules, il aime la
douleur d'être, il aime être assommé par l'autre, il ne existerait
pas sans l'autre.
Ici,
ce n'est pas question d'en vouloir aux artistes qui se cachent du
monde ou qui ne partagent pas leurs œuvres, même ceux qui se
cachent du monde, ils se cachent dans le monde!
Ceux
qui renferment leurs poèmes dans un tiroir, ils le font dans
l'attente de les montrer aux autres, ceux qui se retirèrent du monde
pour créer, il ne le font pas pour nier l'autre, il se cachent à
l'abri de l'autre pour mieux le comprendre, c'est plutôt un acte
d'amour que d'haine.
Pourquoi
l'artiste recherche sans arrêt l'autre, pourquoi il a le cauchemar
de ne plus être reconnu?
Cela
on pourra l'expliquer grâce au plus puissant désir qui abri l'homme
et qui est un couple avec la volonté de s'affirmer: celui d'être
reconnu par son proche, par l'autre, comme nous a bien expliqué
Rousseau, le solitaire, le fou et le paranoïaque pour amour de
l'autre.
La
création, l'art, est surtout relation, c'est la forme primordiale de
communication de l'homme. L'artiste crée pour les autres, il met
tout son être à la lumière du jour, il est nu et animé par une
volonté de partage, par une volonté d'aboutir à un chemin commun
avec l'autre,
l'art,
et l'artiste par ce moyen, est comme une main tendue qui nous dit
tout simplement: "suis-moi, dis-moi, comprends-moi, touche-moi".
Ces
doivent avoir été, peut-être, les mots qui ont animé l'esprit de
Carzou, qui, en se mettant en pleine lumière, nous a laissé une
trace, à travers ce message sur l'apocalypse, étape nécessaire à
l'avènement du Paradis laïque, d'une nouvelle renaissance, d'une
nouvelle ère marquée par le souvenir de ce que a été
l'homme-bête.
Carzou
nous a donné cela en employant ses mains.
Les
mains, outil de manipulation du monde, sont l’organe qui nous
permets d'avertir la forme des choses, leurs qualités de surface,
mais aussi est celui qui nous permet de modifier la réalité de
l’extérieur, en suivant l'image qui vient de notre intérieur.
Le
sculpteur Michel-Ange parlait en ces termes de la sculpture:
"Tu
vedi un blocco,
pensa all'immagine:
l'immagine è dentro basta soltanto spogliarla."
pensa all'immagine:
l'immagine è dentro basta soltanto spogliarla."
C'est-à-dire:
"Tu
vois un bloc,
tu
penses à l'image:
l'image
est dedans, il ne suffit que de la libérer"
Cette
libération se traduit chez le sculpteur comme une seconde sortie de
lui même, quand il crée, c'est son enfant-projection qui naît du
bloc.
L'artiste-sculpteur
transforme la matière naturelle à fur et mesure de sa gestation
dans le monde.
On
peut songer à l'objet crée par la sculpture comme un objet-moyen
d'appropriation du réel, un peu comme les hommes primitifs
faisaient,
vu
qu'ils créaient des petites statues et des graffiti pour s'emparer
des âmes des animaux qu'ils allaient chasser et pour se sentir
protégés face à un monde dont il ne connaissaient pas les secrètes
raisons.
La
sculpture est plus forte qu'une image, un objet sculpté rassemble au
réel, il a trois dimensions, il a un corps, il est présent, il
pourra bien s'animer, il ne lui manque que l'âme ou bien la voix,
mais pourtant on écoute sa voix, notre voix.
Et
la voix, le mot, le langage,
sont
les moyens pour nommer, pour appeler quelque chose.
L'homme
faiseur utilise les mots, il ne les possède pas. Parfois il est
possédé par les mots, il parle sans rien dire,
mais
l'artiste non, l'artiste à chaque fois il crée ses propres mots,
ils invente des mots, il les fais sortir de son âme, de son ventre,
il fait renaître les paroles, il lui confie un sens nouveau que
c'est le sien.
En
parlant de quelque chose, l'artiste lui donne la vie, il la reconnaît
en tant que vivante, en tant que messagère de soi. Il la fait
chanter, il la raconte.
Chaque
poète est à la fois un auteur et un conteur, il crée des mots, il
les tire du plus profond de son âme et ils les fait apparaître.
La
poésie est notamment le chant de l'être, la traduction immédiate
de sensations humaines en mots, en voix, moyens éphémères qui nous
parlent de notre expérience sur terre.
Et
alors, grâce à l'homme créateur, grâce au partage de son
existence qui nous fait,
Photo Fondation Carzou |
qu'il
soit sculpteur, poète ou musicien, en regardant leur créations nous
nous regardons au miroir, nous aussi nous renaissons avec eux, nous
créons, par ce moyen, un dialogue, celui entre notre conscience e
nous même.
L'art
nous met on crise, il nous fait devenir critique de nous même, c'est
celui-ci le miracle de la création laïque, c'est celui-ci le but de
l'objet crée. Et alors, après être devenus critiques de nous même,
il ne nous reste que aller vers l'autre en lui disant "suis-moi,
dis-moi, comprends-moi, touche-moi".
Marco Caccavo
15/03/2013
Manosque/France
1Giacomo
Leopardi, Canto notturno di un pastore errante dell'Asia", vv.
39-41
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